Près de 3.000 couples en moyenne poussent chaque année la porte des deux sites de procréation médicalement assistée en Auvergne, portés par l’espoir de donner enfin la vie. Débute alors un parcours éprouvant ponctué de joies immenses mais aussi de larmes parfois intarissables.
C’est toujours un moment particulier. Dans la salle d’attente rouge et rondeaux allures de ventre maternel du pôle de FIV (fécondation in vitro) de l'Hôpital privé la Châtaigneraie à Beaumont dans le Puy-de-Dôme, des couples de tous âges, de tous horizons. Parmi eux, ils sont nombreux à venir de Haute-Loire. Tous sont accrochés à un même espoir : celui de devenir enfin parents. Des mois pour certains, des années pour d’autres d’attente, d’espoirs déçus et de frustration insupportable. Alors pour donner la vie, la PMA (procréation médicalement assistée) est devenue leur recours, peut-être pas le dernier mais celui qui pourrait les aider à enfin décrocher leur rêve de parentalité.
De l’autre côté de la porte, Florence Alexandre, responsable du service, s’invite dans l’intimité de ces couples en mal d’enfant. « Ce métier est passionnant car on tisse des relations de confiance avec les gens. Ils nous confient ce qu’ils ont de plus précieux, de plus secret. Les liens sont sincères. » Et malgré l’affluence de ce millier de patients par an, la routine n’existe pas. « Voir un petit cœur qui bat pour la première échographie m’émeut toujours autant. Et dans ce cas-là, gestes barrières ou pas, il arrive que l’on se tombe dans les bras…C’est l’aboutissement parfois de tant d’espoirs…et un bonheur sans nom.»
Mais donner la vie et bouleverser la sienne de joie ne se fait pas en un claquement de doigts. Tout juste trentenaires, Coralie et Robin ne le savent que trop bien. Un problème d’ovulation et les voilà lancés à corps perdu dans ce parcours de la PMA : parcours mouvementé assurément.
Entre l’hôpital Estaing à Clermont et la clinique de la Châtaigneraie à Beaumont ensuite, deux ans d’essais, sept transferts d’embryons pour autant d’échecs et enfin le miracle. Matéo né le 13 septembre 2019. Le plus beau des cadeaux après une période d’attente devenue insupportable.
« Il faut une infinie patience, et je n’en ai pas. À chaque tentative, on y croit et puis tout s’écroule. Il faut que le couple soit vraiment solide. Un jour, j’ai supplié Robin de me quitter, d’aller faire un enfant avec une autre femme tellement j’étais désespérée… »
Le couple a tenu bon. Amoureux et déterminé, bien décidé à voir se réaliser son rêve d’enfant. Et lorsque Matéo est arrivé, les traitements, les rendez-vous médicaux, les piqûres… tout ça n’avait enfin plus d’importance. « J’étais enfin maman, l’émotion était immense. Avec mon mari, on ne veut rien rater de lui. On est fusionnel. »
Et puisqu’il lui restait des embryons congelés disponibles, le couple voulu poursuivre son projet de famille. Pour ne pas perdre de temps, lui qui est si précieux et capricieux. Trois nouveaux transferts et l’espoir de donner un petit frère ou une petite sœur à leur bambin. Le dernier essai a fonctionné et le bonheur, à nouveau, refait ses premiers pas. Jusqu’au drame. « En février dernier, j’étais chez des amis et j’ai senti que quelque chose n’allait pas. J’étais à cinq mois de grossesse, tout se déroulait parfaitement bien. Mais mon col ce soir-là n’a pas tenu, la poche des eaux s’est rompue. J’ai hurlé de désespoir… J’ai immédiatement compris que c’était fini. Une fois aux Urgences, les médecins n’ont rien pu faire pour sauver mon bébé. »
Alors, tout s’écroule. Soudainement et violemment. « C’est le pire qui pouvait m’arriver. C’est la pire douleur de ma vie. En un instant, tout s’est effondré… » Un drame suivi d’une perte d’emploi. « Quinze jours plus tard, ma patronne m’a expliqué que tous mes rendez-vous médicaux empiétaient trop sur mon travail, et m’a demandé de partir. »
Croire au « petit miracle »
Défier le temps qui passe, croire à ce que l’on pourrait qualifier de petit miracle, si elle sait que la PMA est tout sauf une science exacte, le docteur Florence Alexandre se démène pour optimiser la quête du bonheur des couples. « Le choix d’un traitement le plus adapté permet de gagner un temps précieux. Car il ne faut pas oublier que l’âge de la femme reste l’un des facteurs cruciaux de réussite. »
Lorsqu’elle jette un rapide coup d’œil dans le rétroviseur, les souvenirs de Florence Alexandre se bousculent. Heureux pour beaucoup et bouleversants pour certains. « Il y a plusieurs années, j’ai reçu un faire-part de la part d’un couple que j’ai suivi. Je l’ai déplié délicatement, car il comportait deux petits volets. Et là, j’ai découvert que les parents des petits jumeaux avaient prénommé leurs bébés Florence et Alexandre. Inoubliable ! »
Et parce que vouloir être à nouveau parents est plus fort que tout, Coralie et Robin, eux, se sont à nouveau lancés dans un processus de PMA, la semaine dernière. Avec le besoin d’avancer et des espoirs plein le cœur, pour à nouveau mettre au monde leur projet de famille unie et épanouie.
La PMA en chiffres
- 400.000 : C’est le nombre d’enfants issus de la PMA à avoir vu le jour en France depuis ses débuts en 1982. Aujourd’hui, un bébé sur 30 est conçu grâce à une assistance médicale. Soit près d’un enfant par classe.
- 70 % Des enfants conçus par assistance médicale le sont par FIV (fécondation in vitro). Le recours à la FIV, dopé par les avancées médicales permet aujourd’hui de répondre à la fois aux infertilités féminines (trompes altérées ou bouchées) et masculines (depuis 1992, la méthode ICSI permet la sélection des spermatozoïdes, directement introduits dans l’ovocyte).
- 3.000 Couples environ ont recours chaque année à la PMA sur les deux sites auvergnats du CHU et de la Châtaigneraie.
- 35,4 : C’est la moyenne d’âge des femmes qui se sont rendues en PMA en 2019 en Auvergne.
- 30 % : C’est le taux de succès moyen de la FIV en Auvergne.
- 43 ans : c’est la limite d’âge fixée par la Sécurité sociale pour la prise en charge d’une FIV dont le coût est estimé à 4.100 euros. Une FIV avec don d’ovocytes est possible jusqu’à 49 ans.
©Carole Eon, « La PMA vient au secours des couples », L’Eveil de la Haute-Loire, 7 mai 2021
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